dimanche 3 avril 2011

Saint Junien et Rochechouart (87)

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Année 2011 : premier séjour à Lailloux (célèbre hameau des Monts d’Ambazac). Notre vénérable maison nous accueille fraîchement au sortir du rude hiver limousin, elle nous fait même un peu la gueule puisqu’elle ne nous a pas vus depuis 5 mois ! Vérification d’usage de notre habitat rural : pas de fuite, RAS pour cette année. Le premier avril le temps vire enfin au beau, huit jours après l’arrivée du printemps. Nous décidons de mettre le cap au sud-ouest : objectif Saint Junien et Rochechouart.

Quelques-uns de nos amis viennent de Saint Junien : les Darchez et Marc Bonnot. C’est une petite ville connue pour ses ostensions, mais que nous n’avions jamais visitée. Pourtant Rochechouart ne nous est pas terra incognita : au château, il y a belle lurette, nous y avons vu une belle exposition dédiée à notre poète national, Victor Hugo, en compagnie de Jacqueline, ma mère.
Ce nom de Saint (autre Julien ?) résonna plus tard dans la bouche de notre amie Marguerite Texier, native de Fanet ? en Limousin, épouse du peintre orléanais Roger Toulouse qui y exposa ses œuvres dans les années 80.
Plus récemment André Brack, à l’occasion d’une conférence Budé intitulée “De l’origine de la vie à la vie dans l’univers”, nous parla d’une gigantesque météorite qui percuta la planète, précisément à Rochechouart (la bien nommée)… ce qui nous incita à rechercher les traces qu’elle y a laissées.…

Ce matin, vendredi 1er avril, nous partons donc pour Saint Junien. À 11 heures, nous voici à pied d’œuvre dans la seconde ville, en nombre d’habitants (12 000), de Haute Vienne. En bon chrétiens, nous nous dirigeons d’instinct vers sa collégiale romane : un massif clocher-porche la signale ainsi qu’une porte peinte d’un jaune assez agressif . À l’intérieur, nichent et veillent sur le lieu saint, de nombreuses statues un peu naïves, en bois peint qui n’occultent pas les fresques abîmées mais expressives, réalisées au XIIe s. Puis le clou d’âge médiéval : le tombeau de Saint Junien, chef d’œuvre de la sculpture limousine du XIIe siècle. Ses restes y reposent en compagnie de celles de Saint Amand et Saint Théodore ! Curieuse mêlée mortuaire !


La suite de notre promenade nous permet de découvrir la cité gantière autrefois riche de toutes ses mégisseries et ses peausseries sises au bord de la rivière Glane. . Après une sévère chute économique, renaissent des ateliers qui fabriquent les plus beaux couvre-mains du monde; Elles en savent quelque chose toutes ces maisons griffées “luxe français“ : Dior, Yves Saint Laurent, Hermès, Lanvin, Vuitton et j’en passe ... Trois entreprises de la ville fournissent aujourd’hui ces boutiques-enseignes de la France aux quatre coins du monde. Ces gants sont de pures merveilles de cuir travaillé devenu doux comme de la soie, unis ou colorés, bariolés, courts ou longs, suggestifs, ils évoquent parfaitement la femme “habillée - déshabillée” selon l’inventivité des designers de talent. 

La maison des consuls, élégant édifice renaissance, rappelle le rôle de surveillance et de police joué par ces édiles élus pour un an… comme dans la Florence de Dante Alighieri, règnaient les podestats.

Promenade apéritive sur le Site Corot, sorte de chaos granitique traversée par la Glane, joyeuse rivière aux eaux boueuses comme le sentier que nous empruntons.Les beaux sous-bois encore peu feuillus laissent passer les lumières ombrées sur les eaux qui inspirèrent le peintre Jean-Baptiste Corot. L’air léger et le soleil caressent les roches granitiques invitant les amoureux à des ébats que nous faisons semblant d’ignorer… sauf quand il s’agit de répérer le médaillon de bronze figurant Corot. Fixé sur un rocher, sa tête profilée se dessine à peine ; divinité du Lieu. Nous rejoignons sa maisonnette de poète, bâtie en surplomb de la Glane, toute pimpante, comme sortie de la gangue hivernale. “Bonjour, Mr Corot”… chantent les oiseaux avec qui nous prenons langue, tout au plaisir de notre balade. 


12 h 45, la faim nous contraint à sortir du sous-bois. Le restaurant Lauryvan s’avère un très bon choix. Placé dans un cadre sylvestre, il offre de bons plats délicatement cuisinés. Nous apprécions en particulier sa somptueuse pièce de bœuf servie sous canapé... sans oublier un dessert à la poire relevée de nougatine. [cliquez sur la photo de gauche]

Requinqués, nous arrivons au château de Rochechouart qui abrite depuis 25 ans le musée départemental d’art contemporain. Château renaissance aux puissantes tours de type médiéval, sa façade intérieure s’orne de curieuses colonnes torsadées qui scandent un peu maladroitement l’espace nu et froid de la cour seigneuriale.. 

Par l’ascenseur, nous accédons au deuxième étage du musée. Un tableau violemment coloré de Gaston Chaissac, intitulé “sans titre” ouvre le bal des contemporains. Notre regard se fixe sur un interminable couloir qui s’ouvre sur des salles numérotées (salle 1, salle 2, sans autres explications, vraiment très pédagogique ! ), nous nous y engageons (toujours un peu anxieux … l’art contemporain ! Vous savez ! )…mais curieusement, nous sommes plutôt intéressés par des œuvres lisibles, parfois esthétiquement réussies, les noms des artistes nous sont parfois connus (Garouste, Raynaud, Klossowitz  — frère de Baltus — ou encore Combas et ses formes de clowns bariolés), nous nous abstenons de commenter le bruit émis par le moteur réfrigérant qui alimente en givre une zone… du format d’un grand tableau. Heureusement les gazouillis d’enfants s’initiants à l’art contemporain s’élèvent progressivement et se substituent au son du moteur réfrigérant… 

Escalier pour le troisième étage où sept mandarins enfermés dans sept cages à oiseaux blanches produisent un nouveau gazouillis que notre arrivée rend plus frénétiques, notre présence stresse ces petits volatiles délicieusement colorés. Ce troisième étage est un gigantesque grenier compartimenté par des œuvres comme la bibliothèque horizontale dont l’éclairage jaune brun nous ravit. La poutraison est voluptueuse et rythme l’espace. Nous prenons plaisir à arpenter ce dernier étage.

Descente au premier où l’exposition temporaire Charlotte Moth, “Noting Thoughts” ne retient pas notre attention. En revanche Raoul Hausmann nous retient et nous permet d’accéder à un univers de lettres et d’onomatopées qui nous poursuit lorsque nous nous engageons vers la sortie. Heureusement un échange qui se voulait un “au revoir” avec le personnel d’accueil nous rappelle que nous avons oublié les fresques du XVIe. Escalier arrière… nous retraversons les poèmes optophoniques de Hausmann pour enfin parvenir à ces fresques, une chasse à courre très colorée nous accueille dans une première salle, puis une fresque monochrome des douze travaux d’Hercule qui retient longuement notre attention, superbe grisaille, finement dessinée.

Nous remontons la rue Dorée vers l’église Saint Sauveur : à gauche de jolis jardins, puis une belle maison dont nous admirons la porte Renaissance. Enfin remarquons cette église St Sauveur, au curieux clocher tor (assorti aux colonnes torses du château).

Au revoir, Rochechouart nous reviendrons, comme à Saint Junien…


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