samedi 30 avril 2011

Les Monts d'Ambazac

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Dimanche de Pâques, à l’heure de l’apéritif, arrivée de Marie-Hélène et de Pierre. Nous honorons l’agneau pascal, puis nous décidons de faire un tour dans nos monts d’Ambazac…

Après avoir traversé Saint Léger la Montagne, nous trouvons Grandmont, pour une fois embouteillé de véhicules. Une horde (tout de même assez restreinte) armée de cartes semble à la recherche de… quelque chose, sans doute un de ces rallyes dominicaux qui permettent aux jeunes gens de bonnes familles de ne pas s’encanailler avec le bas peuple…

L’émouvante petite chapelle, et la  petite exposition, nous rappellent la splendeur perdue de l’ordre de Grandmont, que le perfide Loménie de Bienne détruisit avant la Révolution. Nous avons encore en tête les ruelles, le vallonnement et les solides maisons empierrées de Grandmont, lorsque quelques kilomètres plus loin nous parvenons à Saint Sylvestre, calme cité. Le buste reliquaire de Saint Étienne de Muret, fondateur de l’ordre grandmontain est revenu dans l’église paroissiale après un long séjour, l’an passé, au musée de Cluny. Nous saluons la statue de Sainte Marguerite, un beau Saint Michel et la Piéta malheureusement masquée par une grille qui semble échappée de la centrale de Clairvaux.

Plus bas encore, Ambazac est tout autant désert ce dimanche. L’église romane Saint Antoine est bien fleurie (c’est Pâques !), nous allons voir la chasse reliquaire de saint Étienne, précieux  reste, comme son chef vu à Saint Sylvestre, du trésor de l’ordre…

Nous traversons La Jonchère-Saint-Maurice en nous remémorant le collège du curé Chassaing où Denis Dussoubs s’initia à la rhétorique, jusqu’au scandale qui… (voir l'article de Wikipédia). 

Arrêt suivant sur la place de l’église de Jabreilles-les-Bornes, village escarpé, un escalier champêtre nous conduit au-dessus de l’église. Deux fontaines, dites gauloises, nous laissent admirer la transparence de l’eau qui s’écoule. Sous le porche de l’église : une stèle gallo-romaine dite d’Épona. À l’intérieur un grand autel de facture naïve nous salue, l’église est moussue et humide. Des lithophanies ont remplacées les vitraux, ce sont de plaques de porcelaine, non émaillées finement gravées qui diffusent la lumière.

Pour finir : Saint-Goussaud, dans l’église une statue de Saint-Goussaud et son bœuf porc-épic, en effet, à sa droite un petit bœuf est criblé d’épingles à têtes arondies multicolores. En effet, selon la légende, les jeunes filles qui le piquent ainsi se marient dans l ‘année. À quelques centaines de mètres de l ‘église, nous admirons la lanterne des morts du XIIIe siècle.

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jeudi 28 avril 2011

Les monts de Blond

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Nouvelle balade limousine, dans les monts de Blond situés à une cinquantaine de kilomètres de Lailloux, à l’Est de la nationale 20.

[Cliquer sur les photos pour voir les diaporamas]
 
Départ matinal vers 9 heures, faux départ en fait puisque nous devons retourner à la maison chercher l’appareil photo oublié. Notre parcours nous permet de voir les glycines et les lilas bleuir les verts pâturages limousins. 

Un peu après dix heures, nous sommes à pied d’œuvre, à Cieux, bourgade nullement céleste sise au sud du massif. Elle somnole auprès de son lac,  vrai paradis des pécheurs. Nous faisons le tour de l’église. Devant l’édifice, la statue qui orne le monument aux morts retient notre attention : elle représente  une très jeune fille encapuchonnée d’une longue mante de deuil qui souligne pudiquement la muette  douleur face au désastre. Beaucoup moins véhémente que le garçon de Gentioux (« Maudite soit la guerre ! »), sa dignité est loin des cocoricos belliqueux du gallinacé national qui ont partout poussé après la grande Guerre.


 

En route, les mégalithes et les chaos granitiques nous attendent. Après quelques tours de roues hors de l’asphalte et un bout de chemin à pieds, nous saluons le menhir du Pic, plus de cinq mètres de haut, brisé au premier tiers, 




Ensuite, nous entourons la pierre à cupules d’Arsac, nous repérons les cupules (des petits creux de la taille d'une pièce de 2 €, dont l'usage n'est pas connu), mais les croix annoncées sur notre guide restent introuvables. Ce menhir mesure plus de trois mètres de haut.

 






Puis notre quête nous conduit au dolmen de Rouffignac, une table (2,5 x 2,3 m) portée par seulement trois pieds, l’ensemble culmine à 1,5 m de haut. 



Enfin nous nous hissons au plus près du plus impressionnant des menhirs locaux, le plus grand du département, celui de Ceinturat (cinq mètres de haut, solidement arrimé puisque puisqu’en plus, il s’enfonce de plus de deux mètres dans le sol). En garant la 407, j’accroche la plaque minéralogique dans le chemin (fort peu carrossable), maintenant elle pendouille lamentablement, l’un des deux rivets a cédé. Je rafistole avec le câble d’une baladeuse trouvé dans le coffre de la voiture. 


Nous reprenons notre rallye : cap sur la pierre à sacrifices. J’évite dorénavant d’emprunter les chemins de terre, nous remarquons bientôt au milieu d’un pré fermé, une pierre, est-ce la bonne, celle « à sacrifices » ? Nous en doutons… La faim commençant à nous tenailler, nous ne cherchons pas plus avant.

Pour déjeuner nous avons retenu au Relais à Mortemart, nous prenons la direction de cette petite cité. Un dernier arrêt avant ravitaillement : Montrol-Sénard, charmant petit bourg avec en son centre un vaste lavoir (baignade interdite !) qui fleure bon les anciens temps, d’autres lieus de mémoire rurale peuvent être visités (école, four, saboterie, etc.) dans le cadre d’une initiative locale intitulée « nostalgie rurale ». 

Mortemart est une petite commune (130 habitants) classée parmi les « plus beaux villages de France ». Nous traversons la Halle du XVIIe siècle, solidement plantée sur ses douze piliers en bois, pour atteindre le Relais (de Mortemart). Belle salle spacieuse, très bon repas (foie gras poilé, pièce de bœuf ou bar au fenouil, fromage et tarte aux pommes locales ou Melba opulente), nous reviendrons… Nous faisons le tour du château, merveilleux moment d’harmonie bucolique… dans les douves deux cygnes, l’un blanc, l’autre noir font des volutes avec leurs cous serpentins. Les ruines enlierrées nous charment. Puis nos pas et nos regards parcourent les restes, souvent bien conservés, des trois couvents édifiés par le cardinal Gauvain au XIVe siècle. L’église paroissiale, ancienne chapelle du couvent des augustins offre à nos yeux le régal de ses stalles du XVe égayées de malicieuses statuettes. Nous admirons aussi le beau retable et la statue d’une curieuse vierge du XVe. Un aimable garagiste local permet à ma plaque minéralogique, grâce à un rivet bienvenu, de retrouver horizontalité et stabilité, je lui glisse une pièce malgré son intention de ne rien me demander, nous pouvons poursuivre notre escapade touristique…
 

Nous arrivons dans la petite ville qui a donné son nom au massif : Blond, à l’époque gauloise elle s’appelait Blatomago (marché au blé). Sur la place centrale une remarquable église fortifiée nous attend : son clocher est un donjon flanqué de deux tours. 

 

Nous parvenons ensuite aux rochers de Puychaud, chaos granitique marquant la frontière entre la langue d’Oc et la langue d’Oil, sur l’un des placides monstres arrondis est fixée une plaque, en occitan, elle rend hommage à Frédéric Mistral (1830-1914). Nous retrouvons ici l’ambiance des pays de granit : le Huelgoat en Bretagne ou le Sinobre dans le Tarn.
 
Nous traversons Vaulry avant de retourner à Lailloux sous le chaud soleil limousin. Toujours pas d’eau malgré la demande des paysans dont la terre soufre. D’après MétéoFrance, ce sera pour le prochain week-end, nous ferons avec. Délicieuse journée, merveilleuse découverte de ces monts de granit, d’arbres fleuris, d’étangs et de légendes…


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dimanche 3 avril 2011

Saint Junien et Rochechouart (87)

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Année 2011 : premier séjour à Lailloux (célèbre hameau des Monts d’Ambazac). Notre vénérable maison nous accueille fraîchement au sortir du rude hiver limousin, elle nous fait même un peu la gueule puisqu’elle ne nous a pas vus depuis 5 mois ! Vérification d’usage de notre habitat rural : pas de fuite, RAS pour cette année. Le premier avril le temps vire enfin au beau, huit jours après l’arrivée du printemps. Nous décidons de mettre le cap au sud-ouest : objectif Saint Junien et Rochechouart.

Quelques-uns de nos amis viennent de Saint Junien : les Darchez et Marc Bonnot. C’est une petite ville connue pour ses ostensions, mais que nous n’avions jamais visitée. Pourtant Rochechouart ne nous est pas terra incognita : au château, il y a belle lurette, nous y avons vu une belle exposition dédiée à notre poète national, Victor Hugo, en compagnie de Jacqueline, ma mère.
Ce nom de Saint (autre Julien ?) résonna plus tard dans la bouche de notre amie Marguerite Texier, native de Fanet ? en Limousin, épouse du peintre orléanais Roger Toulouse qui y exposa ses œuvres dans les années 80.
Plus récemment André Brack, à l’occasion d’une conférence Budé intitulée “De l’origine de la vie à la vie dans l’univers”, nous parla d’une gigantesque météorite qui percuta la planète, précisément à Rochechouart (la bien nommée)… ce qui nous incita à rechercher les traces qu’elle y a laissées.…

Ce matin, vendredi 1er avril, nous partons donc pour Saint Junien. À 11 heures, nous voici à pied d’œuvre dans la seconde ville, en nombre d’habitants (12 000), de Haute Vienne. En bon chrétiens, nous nous dirigeons d’instinct vers sa collégiale romane : un massif clocher-porche la signale ainsi qu’une porte peinte d’un jaune assez agressif . À l’intérieur, nichent et veillent sur le lieu saint, de nombreuses statues un peu naïves, en bois peint qui n’occultent pas les fresques abîmées mais expressives, réalisées au XIIe s. Puis le clou d’âge médiéval : le tombeau de Saint Junien, chef d’œuvre de la sculpture limousine du XIIe siècle. Ses restes y reposent en compagnie de celles de Saint Amand et Saint Théodore ! Curieuse mêlée mortuaire !


La suite de notre promenade nous permet de découvrir la cité gantière autrefois riche de toutes ses mégisseries et ses peausseries sises au bord de la rivière Glane. . Après une sévère chute économique, renaissent des ateliers qui fabriquent les plus beaux couvre-mains du monde; Elles en savent quelque chose toutes ces maisons griffées “luxe français“ : Dior, Yves Saint Laurent, Hermès, Lanvin, Vuitton et j’en passe ... Trois entreprises de la ville fournissent aujourd’hui ces boutiques-enseignes de la France aux quatre coins du monde. Ces gants sont de pures merveilles de cuir travaillé devenu doux comme de la soie, unis ou colorés, bariolés, courts ou longs, suggestifs, ils évoquent parfaitement la femme “habillée - déshabillée” selon l’inventivité des designers de talent. 

La maison des consuls, élégant édifice renaissance, rappelle le rôle de surveillance et de police joué par ces édiles élus pour un an… comme dans la Florence de Dante Alighieri, règnaient les podestats.

Promenade apéritive sur le Site Corot, sorte de chaos granitique traversée par la Glane, joyeuse rivière aux eaux boueuses comme le sentier que nous empruntons.Les beaux sous-bois encore peu feuillus laissent passer les lumières ombrées sur les eaux qui inspirèrent le peintre Jean-Baptiste Corot. L’air léger et le soleil caressent les roches granitiques invitant les amoureux à des ébats que nous faisons semblant d’ignorer… sauf quand il s’agit de répérer le médaillon de bronze figurant Corot. Fixé sur un rocher, sa tête profilée se dessine à peine ; divinité du Lieu. Nous rejoignons sa maisonnette de poète, bâtie en surplomb de la Glane, toute pimpante, comme sortie de la gangue hivernale. “Bonjour, Mr Corot”… chantent les oiseaux avec qui nous prenons langue, tout au plaisir de notre balade. 


12 h 45, la faim nous contraint à sortir du sous-bois. Le restaurant Lauryvan s’avère un très bon choix. Placé dans un cadre sylvestre, il offre de bons plats délicatement cuisinés. Nous apprécions en particulier sa somptueuse pièce de bœuf servie sous canapé... sans oublier un dessert à la poire relevée de nougatine. [cliquez sur la photo de gauche]

Requinqués, nous arrivons au château de Rochechouart qui abrite depuis 25 ans le musée départemental d’art contemporain. Château renaissance aux puissantes tours de type médiéval, sa façade intérieure s’orne de curieuses colonnes torsadées qui scandent un peu maladroitement l’espace nu et froid de la cour seigneuriale.. 

Par l’ascenseur, nous accédons au deuxième étage du musée. Un tableau violemment coloré de Gaston Chaissac, intitulé “sans titre” ouvre le bal des contemporains. Notre regard se fixe sur un interminable couloir qui s’ouvre sur des salles numérotées (salle 1, salle 2, sans autres explications, vraiment très pédagogique ! ), nous nous y engageons (toujours un peu anxieux … l’art contemporain ! Vous savez ! )…mais curieusement, nous sommes plutôt intéressés par des œuvres lisibles, parfois esthétiquement réussies, les noms des artistes nous sont parfois connus (Garouste, Raynaud, Klossowitz  — frère de Baltus — ou encore Combas et ses formes de clowns bariolés), nous nous abstenons de commenter le bruit émis par le moteur réfrigérant qui alimente en givre une zone… du format d’un grand tableau. Heureusement les gazouillis d’enfants s’initiants à l’art contemporain s’élèvent progressivement et se substituent au son du moteur réfrigérant… 

Escalier pour le troisième étage où sept mandarins enfermés dans sept cages à oiseaux blanches produisent un nouveau gazouillis que notre arrivée rend plus frénétiques, notre présence stresse ces petits volatiles délicieusement colorés. Ce troisième étage est un gigantesque grenier compartimenté par des œuvres comme la bibliothèque horizontale dont l’éclairage jaune brun nous ravit. La poutraison est voluptueuse et rythme l’espace. Nous prenons plaisir à arpenter ce dernier étage.

Descente au premier où l’exposition temporaire Charlotte Moth, “Noting Thoughts” ne retient pas notre attention. En revanche Raoul Hausmann nous retient et nous permet d’accéder à un univers de lettres et d’onomatopées qui nous poursuit lorsque nous nous engageons vers la sortie. Heureusement un échange qui se voulait un “au revoir” avec le personnel d’accueil nous rappelle que nous avons oublié les fresques du XVIe. Escalier arrière… nous retraversons les poèmes optophoniques de Hausmann pour enfin parvenir à ces fresques, une chasse à courre très colorée nous accueille dans une première salle, puis une fresque monochrome des douze travaux d’Hercule qui retient longuement notre attention, superbe grisaille, finement dessinée.

Nous remontons la rue Dorée vers l’église Saint Sauveur : à gauche de jolis jardins, puis une belle maison dont nous admirons la porte Renaissance. Enfin remarquons cette église St Sauveur, au curieux clocher tor (assorti aux colonnes torses du château).

Au revoir, Rochechouart nous reviendrons, comme à Saint Junien…


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